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La Fille Horizontale
6 février 2013

Je suis une femme battue (2)

Après avoir écrit ce texte, j'ai eu mal au crâne. Le même mal de crâne que quand on a trop crié. Un soulagement, une chute de pression, je ne sais pas trop. J'ai tiré tous les rideaux et je suis allée me coucher, mais je n'arrivais pas à dormir. Parce que je n'avais pas fini. Pas tout à fait. J'envie envie de continuer à parler sans savoir quoi dire exactement, et encore moins comment le dire.

J'avais envie de raconter comment "ça" avait pu se produire.

Il y a eu des signes. Des signes que je n'ai pas vu ou que je n'ai pas voulu voir, des choses que je n'ai pas su interpréter. C'est un peu ridicule et ça ressemble à des citations de cookies fortune, mais aujourd'hui, avec le temps, je ne suis créée un petit manuel, un guide de survie à l'usage des filles un peu trop romantiques ou un peu trop idéalistes ou un peu trop paumées (c'est à dire moi).

fortune20cookie

Quand je l'ai rencontré, il n'a pasdit "Bonjour, je suis un psychopathe mal dans ma peau, abandonné par mon père quand j'étais petit, avec de gros soucis d'autorité, de violence et de confiance en moi".

Mais il a quand même prononcé des phrases qui m'ont donné des frissons dans le dos. Il a dit " Je ne crois pas en la famille", "les gens mentent tous, tout le temps" et un peu plus tard "Si quelqu'un te touche, je prends ma batte, je lui éclate les deux genoux et je le tue." Il l'a dit sans cligner des yeux, avec une froideur effrayante. Et j'ai su qu'il le croyait vraiment.

Un homme ne doit pas te faire peur. Ou même juste te faire sentir mal à l'aise. Même un peu. Ce n'est pas NORMAL.

 

Il n'a pas pris mon visage pour un punching-ball ball, la première fois où l'on s'est retrouvé tous les deux.

La violence a commencé tout doucement. D'abord, il a jeté son ordinateur par terre après avoir perdu à Fifa. J'ai été impressionnée. Et j'ai aussi trouvé ça très con. Mais je n'ai rien dit.

Une fois, il m'a laissé toute seule dans une gare parce que sa carte de crédit venait d'être avalé et qu'il était en colère. J'aurais dû partir sans lui et monter dans le premier train. Au lieu de ça, j'ai erré dans la gare en attendant qu'il veuille bien donner signe de vie. Quand il est revenu, j'avais tellement eu peur qu'il lui soit arrivé quelque chose que j'ai oublié de lui dire que c'était un connard.

Puis un jour, le coup de point de rage n'a pas eu pour cible le mur mais mon ventre. Mais il fallait que je sois forte, c'est lui qui avait des problèmes. Il fallait que je dédramatise, que je le réconforte, que je lui dise "c'est pas grave".

Tu n'es pas une infirmière.

Puis un corps ce n'est rien. J'en étais arrivé à me persuader que ce n'était rien, que de la chair qui saigne et des cheveux qu'on arrache, ce n'est qu'une enveloppe. Et de toute façon, j'ai plutôt une bonne résistance à la douleur.

Tu n'es pas robocop.

C'est lui qui est à plaindre. Artiste torturé. Incompris. Frustré. Il a besoin de moi. Un jour, ça ira mieux. Je peux me sacrifier pour lui. Un jour, il me remerciera d'avoir toujours été là.

Tu n'es pas la Sainte Patronne des laissés-pour-compte.

Tu ne passes pas en second. Pas après lui.

 

Il ne m'a pas subitemment empêché de voir ma famille et mes amis. Il a attendu que je me plaigne, une seule fois, sur un truc stupide, après un week-end à la maison parentale « je dois toujours faire à manger pour tout le monde quand je suis là-bas ». Plainte puérile.

Il a attendu le meilleur moment pour détourner mes paroles et lâcher un «tu ne vois pas qu'ils ne t'aiment pas, tu l'a dis toi même l'autre jour». Il a attendu que je suis suffisamment épuisée pour le croire.

Personne d'autre que toi ne critique ta famille.

 

Il te raconte qu'il n'a pas confiance, que toutes les femmes sont des menteuses aguicheuses, des pieuvres vénéneuses. Elles l'ont toutes trompé et trahi. Ses exs, c'est bien simple, toutes des putes. Aujourd'hui, il parle sûrement de moi de la même façon.

Un homme qui ne respecte pas les femmes, ne te respectera pas.

Tu n'es pas l'exception. Il n'y a pas d'exception. Jamais.

 

Le dernier point, ne concerne que moi. Parce que je suis aussi, un peu, responsable. Je l'ai laissé faire, j'ai fait semblant, j'ai dit «rien n'est grave». Même si j'ai dépassé le stade de la culpabilité, j'ai compris le rôle que j'avais joué dans cette pièce sordide. Je n'étais pas bien quand je l'ai rencontré. J'étais fatiguée, je ne sentais moche, je ne pensais pas mériter mieux. Je mis entre ses mains toutes les cartes pour que ça arrive. J'ai abandonné. Je lui ai dit «fais de moi quelqu'un d'heureux». Il avait un autre projet.

 Avant de vouloir être bien avec quelqu'un, tu dois être bien avec toi-même.

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Commentaires
S
je me souviens de cette histoire de gare . tu m'en avais parlé ...j'ai jamais pigé cette histoire d'enervement sur la console ou l'ordi quand ils perdent aux jeux.. J est pareil ... :-/
V
Je viens de lire les 2 articles à la suite. J'ai voulu commenter le premier en partageant mon point de vue pour avoir vécu à peu près la même chose. Moi je l'ai rencontré quand j'étais en dépression (au travail). J'étais une merde. Mon boulot c'était de la merde. Ma vie c'était de la merde. Et puis il s'est montré présent, 2 semaines. Le temps que j'aille mieux. Et je me suis attachée à lui. Comme si c'était mon sauveur. Et il l'a bien senti. Il m'a trompée, menti, menacée, puis quittée. Une fois que : <br /> <br /> <br /> <br /> 1. j'avais eu la force de lui dire d'aller se faire foutre<br /> <br /> 2. j'avais eu la faiblesse de le laisser revenir <br /> <br /> 3. écouté sa soeur, sa meilleure amie, et ses belles paroles <br /> <br /> 4. accepté son "on fait l'amour au moins ensemble une dernière fois, la plus belle" <br /> <br /> 5. pardonné<br /> <br /> <br /> <br /> Il a trouvé 2 semaines plus tard, une autre proie facile (mère célibataire, avec donc un bébé d'un papa alcoolique, au chômage). Une nana en bon état psychologique quoi, qu'il a sauvé. Mais qu'il est bien loin de respecter plus que moi, puisqu'il l'a trompée. Avec moi...<br /> <br /> Ces hommes là n'aiment qu'eux. D'ailleurs ils passeront toujours en premier (et tu l'as très bien dit). Si moi j'ai mis 6 mois à ouvrir les yeux et à rencontrer quelqu'un d'autre (bon ça fait 2 semaines, mais...) lui a mis 2 semaines. Preuve de son amour pour moi. Maintenant je sais qu'il ne faut pas confondre amour et possessivité. Ce n'est pas la même chose. :)<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai beaucoup trop parlé je suis désolée, je vais créer un blog ça m'évitera aussi de commenter autant et de me lâcher quand même ! Merci pour cet article.. Je reviendrai !
L
bravo pour le chemin parcouru, pour le recul que tu as pris, ton histoire est une leçon pour toutes les femmes et surtout celles victimes de violence, qu'elle soit verbale ou physique. Merci et j'espère qu'écrire cela t'as fait du bien et que tu pourras à présent dormir en paix ;-)
D
Tes témoignages me touchent beaucoup (pour des raisons personnelles et même sans ça). Le pire dans ces histoires sordides, c'est que c'est toujours le même modus operandi qui s'applique. Le vrai visage n'apparaît pas de suite même si effectivement, il y a par exemple, comme des miettes moisies de Petit Poucet, une certaine façon de parler des femmes et des ex notamment, qui fait effet "frisson dans le dos". Mais il montre en même temps qu'il a des failles, que c'est une sorte d'écorché vif, "faut le comprendre, le pauvre".<br /> <br /> Ça ne devrait jamais arriver, ces conneries. Je suis désolée que tu aies eu à vivre ça. Tu es très courageuse et même quand on est vulnérable, on a droit au respect. <br /> <br /> Je te dis merci et bravo d'avoir écrit, de t'être réapproprié ta parole parce que ce genre de mecs, ils ont la manie de réduire l'autre ( au silence.) Bises.
S
Ta dernière phrase est définitivement une conclusion très vraie...<br /> <br /> <br /> <br /> Je suis désolée que tu aies dû vivre ce cauchemar. Mais merci à toi de te livrer une seconde fois pour expliquer à toutes celles qui seraient comme tu le dis trop romantique et gentille pour se méfier. J'ai envie de croire que ton texte saura les mettre en garde.<br /> <br /> <br /> <br /> Bon courage à toi, et merci pour ce texte puissant. Des bises
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